Leonard Cohen et moi
par Ariane Gagnon
Quand j’étais petite, mes parents se faisaient parfois des « soirées fondues » les
vendredis soirs, où ielles tamisaient la lumière, mettaient des disques, écoutaient de la
musique, et soupaient longuement ensemble, en tête-à-tête. Leonard Cohen revenait
souvent dans la rotation, aux côtés d’Alain Bashung ou de Renaud. Je me rappelle que la
voix parfois caverneuse de Cohen, accompagnée de cordes dramatiques, m’effrayait.
Ses mélodies résonnaient entre les murs de notre maison centenaire et l’ambiance me
faisait étrangement peur.
Puis, j’ai grandi, et je me suis mise à entretenir des fascinations macabres pour les
poètes maudits. À 14 ans, je ne rêvais pas d’être une pop star : je voulais devenir le·a
prochain·e Nelligan. Je lisais tout sur le poète québécois au destin glauque, sur Arthur
Rimbaud, sur Verlaine ou sur Edgar Allan Poe. J’écrivais de la poésie (médiocre, en
alexandrins) dans mes cahiers d’école. À force de creuser le sujet, j’ai (re)découvert la
poésie de Leonard Cohen à travers ses livres, puis, j’ai ré-apprivoisé sa musique, qui ne
me semblait plus lugubre du tout, mais bien puissante, profonde, parfois lumineux,
même. « There’s a crack in everything, that’s how the light gets in. » (Cohen, Anthem,
1992)
Quand j’ai déménagé à Montréal, jeune adulte, les quartiers et les endroits fréquentés
par le poète-auteur-compositeur-interprète étaient mythiques, et je rêvais de le croiser
au détour d’une rangée de librairie ou dans un café sur St-Laurent. Malheureusement,
nos routes ne se sont jamais croisées.
Comme certain·es se rappellent ce qu’ielles faisaient le 11 septembre 2001, je me
rappelle exactement où j’étais le 7 novembre 2016. Je travaillais alors à
Outremont, comme cosméticienne dans une pharmacie. Nous avions le privilège de
pouvoir faire jouer la musique de notre choix (dans la limite du raisonnable) sur un petit
haut-parleur Bluetooth. Cette soirée-là, seule dans mon département, j’en avais profité
pour faire jouer un album de Leonard Cohen, qui, je trouvais, se mariait à merveille avec
l’ambiance de fin d’automne. Par pur hasard, une cliente qui entrait dans
l’établissement m’a remercié, en anglais, de lui rendre hommage à ma manière. Or, je n’étais pas au courant que ce grand poète nous avait quitté le jour
même ! J’ai eu un choc ! Pour moi, il faisait partie de ces icônes immortelles,
intouchables.
Bien que Leonard nous ait quitté, son œuvre reste éternelle. Ses nombreux recueils et
romans mis à part, voici une suggestion de livres portant sur cet homme à la vie pour le
moins surprenante… saviez-vous, par exemple, qu’il avait été moine bouddhiste
pendant quelques années ? Il n’a pas fini de vous étonner…
I'm Your Man: The Life of Leonard Cohen, par Sylvie Simmons
J’ai adoré me plonger dans ce livre qui retrace toute la vie de Leonard Cohen, à travers
plus de cent entrevues avec des gens l’ayant connu et fréquenté, dont Rufus
Wainwright, Nick Cave, et ses muses Suzanne et Marianne. Très bien écrit et
documenté, il est évident qu’il a été rédigé par une grande journaliste.
Who by Fire: Leonard Cohen in the Sinai, par Matti Friedman
En octobre 1973, le poète et chanteur, alors âgé de trente-neuf ans, est allé chanter
pour les troupes durant la guerre opposant l’Égypte à Israël. Changé à jamais par cette
expérience s’étant étiré sur plusieurs semaines, où il a rencontré des hommes et des
femmes qui ne traversaient rien de moins que les pires moments de leurs vies, Cohen
avait ensuite annoncé qu’il arrêtait la musique… pour finalement sortir peu de temps
après l’un de ses meilleurs albums en carrière. Ce livre retrace l’histoire de l’aventure
humanitaire de Leonard à Sinai.
Leonard Cohen et son Dieu, par Dominique Cerbelaud
Que l’on soit croyant·e ou non, se plonger dans ce livre, qui propose une relecture des
paroles de l’artiste sous l’angle des thématiques religieuses, est intéressant. Divisé en
huit chapitres abordant tous un sujet différent, les nombreuses quêtes spirituelles du
chanteur sont illustrées par des fragments de ses chansons et des analyses.
Leonard Cohen On a Wire, par Philippe Girard
Si vous préférez le médium de la bande dessinée, ce livre est pour vous. Retraçant la vie de l’artiste de sa jeunesse à son dernier jour, il survole ses inspirations, les différents
événements marquants de sa vie, le tout, dans une sublime palette de couleurs.
Il existe des tonnes d’ouvrages au sujet de ce grand artiste, et peu importe que vous
soyez un·e initié·e ou non, demandez à Jean (a.k.a. Johnny Résonance), et il se fera un
plaisir de vous guider dans vos choix ! Bien sûr, ces livres sont à savourer en écoutant les
chansons de Cohen en trame sonore, c’est essentiel !
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